Bulletin de la Société Paul Claudel, n°223

Sommaire

Philippe Forest à Brangues

Catherine Mayaux
–  Court portrait de Philippe Forest en miroir décalé de Paul Claudel, 13

Philippe Forest
–  Dans le sein d’Abraham, 17

–  Échanges avec Philippe Forest, menés par Catherine Mayaux, 27

Souvenirs de Russie et d’Europe Centrale

Elena Galtsova
–  La Tiare du siècle (1922-1923) de Paul Claudel et Ivan Aksenov. Traduction, mise en scène, publication,  37

Sœur Barbora Turkova
–  Les amitiés françaises de Jan Čep. À propos des travaux de Jan Zatloukal, 51

Jan Čep
–  Visite à Paul Claudel, 55

Note

Michel Wasserman
–  Paul Claudel et l’Indochine. Bonnes feuilles, 67

En marge des livres

–  Paul Claudel, Lettres à Ysé (Jean-Yves Tadié), 75

Actualités

Françoise Magny
–  Le musée Camille Claudel à Nogent-sur-Seine. Genèse du projet, 81

Annonces

Cent cinquantenaire de la naissance de Paul Claudel, 99

Bibliographie, 107
Résumés/Abstracts, 109

 

 

 

La Tiare du siècle (1922-1923) de Paul Claudel et Ivan Aksenov.Traduction, mise en scène, publication

Pour tous ceux qui s’intéressent à « Paul Claudel et la Russie », La Tiare du siècle a la réputation d’un texte énigmatique, à la fois très attirant et inaccessible. Pourtant, à Moscou, plusieurs manuscrits de cette composition dramatique en langue russe, écrite par Ivan Aksenov, d’après L’Otage et Le Pain dur de Paul Claudel, figurent dans les archives accessibles depuis au moins les années 1990 : les plus connues sont la RGALI (Archives d’État russe de la littérature et de l’art) et le département des manuscrits de la bibliothèque de la STD (Société des gens de théâtre) ; plusieurs chercheurs de plusieurs pays ont pu y accéder et voir le manuscrit de La Tiare du siècle. L’histoire de cette traduction et de sa tentative de mise en scène est liée au théâtre de Vsevolod Meyerhold, mais pendant un certain temps, cette pièce est tombée dans l’oubli pour des raisons politiques liées au procès Meyerhold. Il est difficile de dire qui exactement l’a tirée de l’oubli le premier, mais on peut citer Les Mémoires d’Alexandre Fevralskij, collaborateur de Meyerhold1, parus en 1976. Depuis cette date, cette composition dramatique est presque toujours mentionnée quand il s’agit d’évoquer la réception de l’œuvre de Claudel en Russie2.

Cette pièce, due aux talents de deux poètes, Claudel auteur à la source du texte, et Aksenov, auteur de la traduction-adaptation, mérite sûrement plus qu’un intérêt purement historique. Pourtant la publication de ce texte a connu bien des difficultés pour plusieurs raisons. Il ne s’agit pas à proprement parler de la traduction des pièces de Claudel, il y a de nombreux écarts par rapport au texte français, et il était délicat de le publier avant que soient publiées les traductions plus fidèles des œuvres sources claudéliennes. D’autre part, le nom d’Ivan Aksenov (1884-1935), poète avant-gardiste du groupe « Centrifuga » (1913-1917)3, spécialiste du théâtre élisabéthain et homme de théâtre dans les années 1920-1930, est resté longtemps oublié en URSS et en Russie depuis les années 1930, sauf des spécialistes : une publication sérieuse de ses œuvres a été entreprise en 20084 seulement, mais sans le riche patrimoine des travaux du traducteur. La dernière difficulté fut d’ordre technique : Aksenov n’a pas laissé un texte définitif de la traduction. À Moscou, nous disposons de quatre versions de La Tiare. Les deux versions les plus accessibles sont deux tapuscrits conservés dans les Fonds liés au théâtre de Meyerhold à RGALI : le tapuscrit relativement complet du Fonds Garine, comédien de la troupe de Meyerhold (RGALI, Fond Garin, 2979 -1-581. ff. 1-145), et le tapuscrit abrégé du Fond de GosTiM (RGALI, Fonds GosTiM, 963 -1-1327. ff. 7-18) qui correspond à un extrait qui a été joué sur scène. Mais les versions les plus intéressantes et les plus complètes sont deux tapuscrits conservés dans les archives d’Ivan Aksenov qui ont été vérifiés par lui-même, au moins en partie, et qui ont été déposés au département des manuscrits de la bibliothèque centrale de recherche de la Société des gens de théâtre (STD) (comportant respectivement 164 ff. et 166 ff.). Ces tapuscrits ne figurent pas toutefois dans le catalogue général, et ils n’y ont pas de cote. Grâce à l’enthousiaste directeur de la STD, Vladimir Netchaev et à la spécialiste du théâtre de Meyerhold, Olga Kouptsova, nous avons pu avoir accès à ces textes, et procéder à leur édition scientifique dans un recueil présentant des matériaux d’archives et une étude critique, réalisé par un collectif de chercheurs internationaux, publié sous le titre La connaissance de l’Ouest. La culture étrangère dans la littérature, les arts et la théorie soviétiques. 1917-1941. Recherches et matériaux d’archives (Moscou, Institut de littérature mondiale de l’Académie des sciences de Russie, 2015)5. Pour cette édition, c’est le tapuscrit de 164 feuillets de la STD qui a été retenu comme étant le plus complet, et accompagné d’un apparat critique indiquant les variantes et les écarts entre les quatre manuscrits examinés.

Pourquoi monter la Trilogie des Coûfontaine sur la scène révolutionnaire du début des années 1920 ?

Les premières mentions de La Tiare du siècle paraissent vers la fin 1921-début 1922 dans les périodiques consacrés aux projets de mise en scène au théâtre de Meyerhold. On l’appelait « une trilogie », son auteur : Paul Claudel, son traducteur : Ivan Aksenov, homme de théâtre et un des collaborateurs de Meyerhold. Inutile de chercher chez Claudel une œuvre portant un tel titre puisqu’il a été inventé par Aksenov pour sa composition à partir du cycle des pièces formant la trilogie de la famille des Coûfontaine – L’Otage (première édition 1911, création 1914), Le Pain dur (première édition 1918, création 1919) et Le Père humilié (publication 1919, création en Allemagne 1926, création en France 1946). Ainsi, la trilogie des Coûfontaine a servi de base à l’invention de La Tiare du siècle. Aksenov a donné à sa composition le sous-titre « la Trilogie », et dans les milieux de théâtre russe de l’époque, on la désigne souvent sous la même appellation. Après avoir analysé les quatre versions de ce texte qui sont conservées aux Archives d’État russe de la littérature et des arts (RGALI) et aux archives de la bibliothèque de la Société des gens de théâtre (STD) déjà mentionnés, nous devons toutefois constater que, malgré le sous-titre « trilogie », aucun de ces tapuscrits (même le plus complet, celui de la STD qui a été publié en 2015), ne comporte trois parties, mais au plus deux, correspondant à L’Otage et au Pain dur.

Ce qui intrigue dans cette histoire de la traduction, c’est le choix même des pièces de Claudel pour le théâtre de Meyerhold au début des années 1920, époque où il est un des leaders de la rénovation radicale de l’art théâtral liée à la révolution d’octobre. Je proposerai ici deux hypothèses.

Primo, on pourrait supposer que c’est la réalisation d’un rêve datant d’avant la révolution, quand il découvrit avec passion l’œuvre de Maeterlinck6 et le genre du mystère. Il en résulta au moins deux projets : celui de la mise en scène de L’Échange, réalisé en 1918 avec Alexandre Taïrov sur la scène du théâtre Kamerny, mais Meyerhold en fut écarté alors que le spectacle était déjà prêt ; et celui des tentatives (non abouties) de mise en scène de Tête d’Or, vers 1920 au moment où Taïrov, son concurrent, monte L’Annonce faite à Marie7.

La seconde hypothèse relève, au contraire, de la recherche d’une nouvelle esthétique : Meyerhold travaille sur les genres théâtraux, et après avoir expérimenté le mystère en montant en 1921 Le Mystère Bouffe de Maïakovskij8, il s’oriente vers le genre de la « tragédie héroïque révolutionnaire », et pour cela, revient à Claudel. De plus, un des problèmes les plus aigus au début des années 1920 était la création de pièces dont le thématique soit liée à la révolution ; au début c’est la Révolution Française de 1789 qui est présentée sur la scène de la nouvelle Russie. Rappelons à ce propos que Claudel, qui voulait dévoiler dans sa Trilogie certaines des conséquences de la Révolution Française, en parle, par exemple dans sa lettre à Gabriel Frizeau en mai 1908 :

Je voudrais composer un cycle de drames ne produisant pas seulement des personnages, mais l’ensemble des moyens, multiples et convergents par lesquels ces personnages sont produits pour les fins prévues de Dieu. Il est assez possible que je prenne pour cadre une histoire audacieusement arrangée du xixe siècle où je distingue trois phénomènes intéressants :

1o La Révolution Française que j’appellerai révolution contre le hasard.
2o La connaissance de la terre.
3o La séparation de la terre et de l’homme qui n’y a plus d’attaches9.

À cela s’ajoute aussi une circonstance favorable « personnelle » : Claudel fut très apprécié par Anatolij Lounatcharskij, lui-même inspiré par Wagner et le socialisme avant la révolution et qui devient après la révolution le commissaire du peuple à l’Instruction publique (Narkompros). En 1913 Lounatcharskij appréciait particulièrement Claudel et Verhaeren : « Ces deux poètes sont les deux pôles de la culture moderne qui devient de plus en plus combative. Ils se tiennent armés sur les deux rives du torrent social, ici et là appellent à l’énergie, ici et là sont pleins d’espérances10 ». En 1914 Lounatcharskij a vu la mise en scène de L’Otage par Aurélien Lugné-Poe au Théâtre de l’Œuvre et y a consacré un article en soulignant « l’exposition passionnante de l’héroïsme et l’abnégation de la personne humaine11 ». Mieux encore, il voit dans les derniers moments de Sygne une véritable transgression de la morale catholique et la libération des sentiments purement humains lorsqu’elle refuse de pardonner à Turelure, ce qui va à contresens de ce qu’a voulu dire Claudel.

Apparemment le christianisme de Claudel, très critiqué dans des articles concernant la mise en scène moscovite de L’Annonce faite à Marie, devenait de plus en plus gênant, au moment où commençait en Russie soviétique la lutte contre la religion. Peut-être était-ce aussi l’argument pour changer l’interprétation du « genre » des pièces de Claudel en allant dans le sens de la « tragédie ». L’ambition de Meyerhold fut très grande – il aurait voulu faire la création mondiale de la Trilogie, qui, rappelons-le, n’a jamais été jouée en entier à l’époque, et, à l’exception de L’Otage, les deux autres pièces n’ont guère eu de succès en France avant les années 1940. En effet, en 1920, Jacques Copeau a projeté de mettre en scène la Trilogie au Vieux Colombier, et il en existe des témoignages privés, mais cette idée n’a jamais été réalisée.

La Tiare du siècle
Une école théâtrale de la tragédie

Le 14 janvier 1922, Meyerhold dans une lettre adressée au ministère de l’Instruction publique (Narkompros) annonce La Tiare du siècle « adaptée » par Ivan Aksenov12. Ivan Aksenov, ami et collaborateur de Meyerhold, traducteur en 1921 du Cocu magnifique de Fernand Crommelynck pour son théâtre, fonctionnaire dans l’éducation publique et d’autres organisations soviétiques, venait à ce moment de créer un établissement d’enseignement du théâtre qui deviendra l’Institut d’art théâtral GITIS dont il sera le premier recteur, précisément en 1922. Ainsi le 7 février 1922, il constate : « La Tiare est réécrite et je commencerai le travail à partir du 1013 ». Mais les affaires administratives l’empêchent d’avancer. Il ne reprend son travail qu’à l’été, comme en témoigne sa lettre à Meyerhold du 13 août 1922 : « La première partie de La Tiare du siècle est presque terminée dans sa mise en voix, la seconde n’est pas encore réécrite14 ».

Le spectacle est annoncé fin décembre 1921-début janvier 1922 dans les projets de répertoire du Théâtre de l’Acteur pour la seconde partie de septembre 1922. On voit la même annonce dans des périodiques de théâtre jusqu’en juin. Mais en juillet-août, on change le lieu de la mise en scène – le projet se déplace alors progressivement dans le théâtre d’études du GITIS qui vient d’être créé. Dans l’hebdomadaire L’Ermitage du 22-28 août, on annonce que les répétitions de La Tiare du siècle se passent dans l’Atelier Libre de Meyerhold, et qu’elles sont supervisées par Aksenov. Au début, c’est Valérij Bebutov qui a été sollicité pour la mise en scène, mais finalement on a fait glisser le spectacle vers l’étudiant en mise en scène Vassili Fedorov qui participe aux répétitions à l’automne 1922. Le spectacle devient un des champs de la réalisation de la biomécanique meyerholdienne. En octobre, on annonce la vente des billets pour les spectacles d’étude, et La Tiare du siècle est programmée pour la fin octobre. On voit dans les archives conservées dans RGALI que près de vingt personnes participent aux répétitions et qu’on prévoit un spectacle en deux parties, et c’est Meyerhold qui les dirige. Mais pour finir, il ne restera de ce projet qu’un extrait du premier acte du Pain dur (correspondant aux scènes de la deuxième partie de La Tiare du siècle)15, et le nombre de comédiens-étudiants a été réduit : Sichel a été jouée par I.D. Balmont, Lumir tantôt par T.V. Kachirina (1900-1995, Kachirina-Ivanova), tantôt par Bihovskaïa, Turelure par D.N. Orlov (1892-1955).

Le choix de ce fragment est symptomatique – c’est là que se noue l’intrigue des deux femmes visant à prendre l’héritage de Turelure, et cette histoire doit montrer au spectateur soviétique les visées de la société bourgeoise. Mais le plus bizarre est que cet extrait a été monté sous le label de ce titre d’inspiration religieuse, rappelant la tiare du pape, dont on ne parle pas du tout dans l’extrait choisi. C’est d’autant plus ambigu que l’extrait a été joué en même temps que d’autres spectacles au pathos anti-clérical.

Finalement cet extrait a été joué sous le nom de La Tiare du siècle le 22 janvier, les 8, 15 et 25 février, et en mars 1923, dans le cadre de soirées où ont aussi été présentés d’autres spectacles (ou fragments) d’études : La Tragédie de Nora Helner (d’après Une Maison de poupée d’Ibsen), la récitation de poèmes de Trétiakov, Asseev, Maïakovski, Aksenov, la comédie de S. Bobrov, La Prothèse du Magistre Troplong, L’Épidémie d’Octave Mirbeau, La Conception virginale de Sergueil Tratiakov, La Mort de Tarelkin d’Aleksandre Souhovo-Kobylin, etc.

La Tiare du siècle sera pour le jeune metteur en scène Fedorov un champ d’expérimentations inspiré surtout par Le Cocu magnifique de Meyerhold et par Gaz 1 et 2 de G. Kaiser dans l’interprétation de Lubov Popova16. L’essentiel pour lui est d’inventer une « construction » qui incarnerait toutes les tensions tragiques entre les personnages de la pièce. Dans le livret du programme, on parle de Fedorov comme d’un « metteur en scène et constructeur ». Le travail technique de la construction du décor a été fait par Arsenij Petrov, fidèle charpentier du théâtre de Meyerhold de l’époque. Les costumes ont été élaborés par Lubov Popova – c’étaient des salopettes d’ouvrier (prozodejda), typiques du théâtre de Meyerhold à cette époque.

La tâche de Fedorov est purement théâtrale, c’est l’élaboration de la construction et des mécanismes pour présenter une tragédie, ces recherches étant inspirées par le constructivisme et la biomécanique de Meyerhold qui s’opposait au théâtre psychologique dans le style de Stanislavskij. Ainsi la création d’un nouveau théâtre, celui du théâtre de metteur en scène, passe par la recherche de nouveaux genres et modes de représentation. Dans les ateliers de Meyerhold, on parle de tragédie (le tragique-héroïque) et de farce (le comique bouffon). Celle-ci triomphe dans Le Cocu magnifique. La pièce de Claudel va permettre de résoudre le problème de la tragédie, surtout sur le plan technique. L’essentiel est de trouver des mécanismes psychologiques d’action sur le spectateur.

Citons la description que donne Fedorov de sa construction :

La tragédie se déroule sur une plateforme suspendue et sur les trottoirs suspendus qui peuvent monter et descendre, ce qui permet de disposer non seulement les personnages à des hauteurs différentes en les faisant se déplacer non seulement à l’horizontal mais aussi à la verticale. Pour produire l’effet d’un brusque surgissement, on utilise un ascenseur ou une échelle de corde. Tous les « objets » qui ne prennent pas directement part au jeu, mais qui sont nécessaires car ils figurent dans le texte, sont rejetés dans la salle et se trouvent donc en dehors de la construction scénique. La tragédie se déroulant sur un fond sonore, on place un orchestre de bruits devant la scène, là où se trouve d’habitude l’orchestre à l’opéra. La place du chef d’orchestre est occupée par le metteur en scène. Il doit non seulement orchestrer les bruits mais aussi, à partir d’un appareil de signalisation, diriger les machinistes sur les ascenseurs, les assistants à la mise en scène et les éclairagistes. Les sources de lumière doivent être situées sur la scène et aussi dans la salle17.

L’essentiel, pour Fedorov, est de placer l’acteur dans l’immense espace nu du plateau de telle sorte qu’il devient « l’élément dominant ».

Arkadij Pozdnev, élève de Meyerhold explique d’où est venue l’idée d’installer une plateforme :

Les machines primaires des pièces américaines, le jeu sur les plateformes qui s’effondrent (les trappes) ou bien le jeu sur les hauteurs, les déplacements sur des surfaces limitées et limitables, etc. qui sont les procédés favoris des cinéastes occidentaux, tout cela, retravaillé et appliqué au théâtre, est capable d’orienter le psychisme du spectateur vers la nouvelle tragédie héroïque18.

Au bout de cinq représentations, La Tiare du siècle sera suspendue. Nous n’avons pas trouvé d’explication à cela dans la presse, mais des documents non signés et non édités des archives du théâtre de Meyerhold à RGALI, indiquent ceci : « à cause de l’incompatibilité avec les tâches de l’Atelier19 ».

Il est évident que ce n’est pas la qualité du travail « monumental » de Fedorov et des jeunes comédiens qui a été mise en cause, mais c’est l’œuvre même de Claudel. À la même époque, Taïrov ne peut plus reprendre les représentations de L’Annonce faite à Marie et renouveler L’Échange, et le nom de Claudel apparaît de moins en moins dans la presse soviétique. L’incompatibilité idéologique s’est révélée finalement comme une évidence.

La dramaturgie de Claudel avait pour Meyerhold et son théâtre d’études l’avantage d’être un objet de refonte radicale, un peu comme il l’a fait avec Les Aubes de Verhaeren, et aussi dans L’Échange au Théâtre Kamerny ; c’est-à-dire qu’il cherchait un objet pour son théâtre de metteur en scène, où le texte est interprété très librement, et où l’infidélité est à l’honneur. Aurait-il pu se permettre d’agir ainsi avec Rolland qui était déjà devenu une figure étrangère clé de la culture soviétique ?

Aleksandre Fevralskij note dans son aperçu de la dernière soirée en mars 1922 où fut joué La Tiare du siècle : « La pièce n’est pas réussie du point de vue de sa scénicité. C’est une causerie permanente. Et cela a créé beaucoup de gêne pour le metteur en scène. D’autant plus intéressantes sont les constructions qui bougent dans le sens vertical20… ». C’est dans le même sens que s’exprime l’auteur inconnu dont nous avons déjà cité les notes : « Dans la tragédie l’action est construite par Claudel de manière verbale, si l’on peut le dire ainsi, et l’action est réduite au minimum, les personnages sont presque tout le temps assis. Mais la tragédie est pleine de tension interne. Et elle est faite de telle manière par son auteur qu’on ne peut littéralement y couper quoi que ce soit21 ».

Fedorov explique presque la même chose dans sa description déjà citée : « La tension dans le développement de l’action de la tragédie, la sobriété des mouvements, le hiératisme presque, nous ont obligé d’inventer pour la scène des formes telles qu’elles puissent dérouler la tragédie devant le spectateur avec le plus d’expressivité possible22 ».

Sa construction n’a pas de rapport direct avec la pièce de Claudel, qui en ferait un théâtre mimétique, mais c’est une abstraction qui est en rapport avec une certaine compréhension du texte. Le texte est compris comme l’incarnation du genre de la tragédie en tant que construction dynamique des tensions tragiques entre les personnages. Et son but a été de tenir les spectateurs dans cet état de tension. Citons encore notre auteur inconnu : « Si chez Claudel cette tension est interne, et purement verbale, dans le spectacle de Fedorov, elle doit être révélée en dehors, dans les actions externes : le rythme interne de Claudel doit devenir le rythme externe dans le spectacle de Fedorov ». Il rapproche ces procédés de ceux du théâtre chinois : « Les objets qui ne jouent pas, le Blason et la Croix, sont mis dans la salle. Sur la scène, tout doit jouer et être dynamique. C’est une grande affirmation du nouveau théâtre. Dans le théâtre chinois, tout ce qui est dans le champ de l’action, doit servir le jeu […]. Ainsi le nouveau théâtre mécanisé doit résoudre brillamment cette question qui nous a été posée par le théâtre chinois […] ; en ce sens, la mise en scène de Fedorov possède une grande valeur artistico-scientifique23 ».

Faisant abstraction du texte de Claudel, le spectacle de Fedorov (du moins son projet) a révélé une théâtralité tout à fait spécifique propre aux drames de Claudel : les excès des caractères de ses personnages (donc leur anti-réalisme, et même un certain anti-psychologisme), le caractère schématique des situations, le rythme spécifique, les associations avec les sources premières du théâtre, c’est-à-dire tout ce qui constitue la modernité de sa dramaturgie. L’évocation du théâtre chinois peut être une allusion, consciente ou non, à la passion qu’a eue Claudel pour la culture chinoise.

Ainsi La Tiare du siècle a actualisé les mécanismes de la tragédie, et extériorisé sa dynamique interne. Ce projet est intéressant précisément par son caractère abstrait, car il a affaire à l’essence des choses, qui, comme nécessaire dans le système théâtral, ont revêtu des incarnations métaphoriques.

Le travail du traducteur
Trahisons et fidélités

Même si le texte de La Tiare du siècle a été peu prononcé sur scène, le travail du traducteur mérite d’être présenté, au moins de manière sommaire. Parmi les quatre manuscrits que nous avons examinés, trois contiennent le texte achevé, mais avec des variantes. En le publiant, nous avons pris la version la plus riche, que nous avons considérée comme « complète », mais nous avons essayé de mentionner des variantes significatives dans les notes. Mais ce geste a été consciemment arbitraire car nous ne savons pas si Aksenov avait l’intention de publier son texte. Ces variantes, dans la plupart des cas, témoignent plus de soucis scéniques (des aspects sonores) que de recherches concernant la netteté de la traduction.

Si l’on considère cette traduction du point de vue de sa fidélité aux textes de Claudel, il faut tout de suite dire qu’il s’agit d’une traduction libre, à commencer par son titre, et tout le monde à l’époque insistait sur la double attribution de ce texte, à la fois à Claudel et à Aksenov. Aksenov introduit des changements dans la structure des pièces. Tout d’abord, même si son œuvre s’appelle « trilogie », c’est toujours une pièce en deux parties, qui sont aussi appelées « actes » (correspondant à L’Otage et au Pain dur) et il n’y a pas de sous-titres mentionnant les deux sources de la traduction. Aksenov a beaucoup remanié la structure formelle du texte, il a omis la plupart des didascalies, il n’a pas respecté la division claudélienne en scènes et actes, et parfois il a même coupé dans le texte. Pourtant ces changements, qui sont plus nombreux dans la seconde partie, paraissent plutôt techniques, rendant le texte plus facile pour sa présentation sur scène. La réduction des didascalies s’explique du fait que ce texte était destiné pour le théâtre d’un metteur en scène, qui, de toute façon, les aurait changées.

La plus grande intervention sur le texte même apparaît dans l’acte II scène 224, dans la dernière argumentation de Monsieur Badilon qui pousse finalement Sygne au sacrifice de sa vie privée et de sa famille pour sauver le Pape. Aksenov invente cette réplique insistant sur le péché des ancêtres de Sygne qui ont déjà offensé le Pape une fois ; ainsi le sacrifice de Sygne aurait dû être une sorte d’expiation de cette offense. Chez Claudel l’argumentation consiste dans le rappel de l’appartenance de Sygne à l’Église par le fait même de son baptême, tandis que l’histoire du péché familial surgira dans les scènes ultérieures. L’argumentation chez Claudel est purement religieuse, l’argumentation chez Aksenov est logique, et plutôt sociologique. Dans l’acte II scène 4 (la mort de Sygne), Aksenov fait deux substitutions sémantiques. Les images de pasteur, de brebis, de l’épouse absolue et de l’enfant spirituel, dominantes dans le texte de Claudel, sont remplacées par l’atmosphère apocalyptique des moissons. Les dernières paroles de Sygne, au lieu du « tout est épuisé » de Claudel, sont « ce n’est pas vrai, il n’y a rien », à propos de Dieu le Père et le Fils. C’est-à-dire que chez Aksenov, Sygne perd sa foi, elle est tout simplement une femme héroïque. Chez Claudel, Sygne devient presque une sainte sans en avoir conscience, mais le spectateur le comprend grâce aux commentaires de Monsieur Badilon qui sont remaniés par le traducteur. On peut trouver d’autres écarts de sens du même ordre chez Aksenov, mais on ne peut néanmoins affirmer qu’il ait essayé d’évacuer totalement le thème chrétien de la trilogie.

Le désir d’adapter, et en fait de simplifier le texte étranger, est assez répandu chez les traducteurs russes de l’époque, et en cela, ils continuent la tradition de la traduction libre du xixe siècle. L’exemple cité de l’argumentation de Badilon est très significatif, mais on ne peut pas dire pour autant qu’Aksenov essaie d’évacuer tout ce qui concerne l’argumentation chrétienne. Au contraire, il transpose des discours chrétiens et des réflexions concernant la religion en termes familiers pour les Russes de son époque, en employant des mots du culte orthodoxe. Bien plus, il traduit en russe la plupart des formules latines, ce qui distingue son travail de celui de Vadim Cherchenevitch (L’Annonce faite à Marie) pour le Théâtre Kamerny, qui a voulu obtenir un certain effet d’étrangeté en abusant des mots latins dans les associations religieuses. Cette étrangeté exagérée du catholicisme aurait dû exprimer l’étrangeté du christianisme en général pour le spectateur de la Russie des Soviets. Mais rappelons que cette stratégie n’est pas absolue chez Cherchenevitch qui, en même temps, traduit le titre de L’Annonce par L’Annonciation, en la rapprochant ainsi plus directement du terme chrétien, et reproduisant en même temps la tradition allemande de la traduction de ce titre de Claudel25. Aksenov utilise rarement le latin dans le texte ; mais l’expression « Coûfontaine adsum » sera utilsée en toutes lettres dans la construction de Fedorov. Tandis que le thème chrétien chez Aksenov est plus « russifié », il sonne de manière très compréhensible pour le spectateur russe. Cela ne signifie pas qu’Aksenov voulait révéler le sens profondément chrétien des pièces, mais cela reflète plutôt le langage de son époque, encore très proche du « siècle d’argent » russe26. La lutte sérieuse contre la religion n’est pas encore vraiment active dans la Russie des Soviets, elle a juste commencé en 1923, et Aksenov use dans la pièce de mots familiers pour les orthodoxes. Mais déjà quelques années plus tard, une telle traduction aurait pu paraître trop religieuse, comme c’était par exemple le cas pour l’Hérodiade de Flaubert, traduite par Tourguéniev, qu’on a eu peur de publier en URSS, à cause des termes trop orthodoxes qui y sont employés. Dans les années 1930 s’ouvre toute une discussion provoquée par l’éditeur de Flaubert, Marc Eihengolts, sur les manières de traduire les termes religieux d’une autre confession : Eihengolts affirme dans son article publié dans « Krasnaïa Nov » (1935, N 727) que les réalités catholiques doivent être traduites par des mots plutôt latinisés, savants et érudits, pour que le texte sonne « étranger » et « scientifique » aux oreilles du public russe, ainsi on évitera toute association avec l’orthodoxie, encore familière pour une certaine génération. Dans l’édition académique de Flaubert où figure cette traduction, le commentateur Mihaïl Kleman attire l’attention sur l’abondance des mots en slavon d’église et des archaïsmes dans la version de Tourguéniev, comme constituant son grand défaut28. Dans cette perspective, l’emploi par Aksenov du lexique orthodoxe peut être considéré comme le signe d’une certaine fidélité à l’esprit religieux de Claudel.

Une autre particularité de la traduction d’Aksenov est le souci du rythme. Dans ses lettres déjà citées, Aksenov suggère qu’il vérifie son texte par la prononciation orale. Pour traduire le verset claudélien (variante originale de vers libre, et inspiré par la sonorité des versets bibliques) Aksenov utilise la prose rythmée, avec des écarts syntaxiques (par rapport à la langue russe courante), et parfois le « vers blanc ». La parole des personnages sonne de manière détachée, elle est pathétique et théâtrale. Les principes de la traduction des pièces en vers intéressait beaucoup Aksenov qui en a fait une théorie dans sa préface pour le recueil des drames élisabéthains traduits par lui-même en 1916 : il y comparait la libération de la versification anglaise aux xvie-xviie siècles aux techniques modernes, comme chez Walt Whitman29. Aksenov se prononçait ici contre l’imitation du système de versification anglaise en proposant le « vers blanc russe ». En fait il prônait son opposition au principe de fidélité, prenant comme exemple la fameuse traduction du drame de John Ford par Maeterlynck, qui en a fait une transposition très libre et en a inventé le titre Anabella, devenue ainsi une œuvre culte pour les symbolistes français. En travaillant sur le texte de Claudel, Aksenov a essayé d’harmoniser deux principes, de créer une sorte de discours déclamatoire, d’un registre poétiquement élevé, et cela se traduisait dans une tendance au rythme régulier ; d’autre part, il essayait de rendre la poétique de la rupture, le dramatisme aigu et extrême, très émotionnel et passionné des « tragédies » de Claudel, et pour ce faire, il recourait à la prose, en travaillant à la rendre rythmée de temps en temps.

Les principes de la traduction adoptés par Aksenov sont dans l’air de son époque. Rappelons le fameux article de Brioussov, « Les Violettes dans le creuset », de 1905 où l’on postule l’idée, encore très romantique, que la traduction poétique ne doit pas être fidèle aux images, mais qu’elle doit pénétrer dans le mystère de la création ; ainsi le traducteur est surtout le rival du poète qu’il traduit. La valeur de la traduction d’Aksenov est dans la recherche de la transposition du texte poétique de Claudel, et dans la fidélité, finalement, à son esprit musical.

La Tiare du siècle est une œuvre incontestablement digne d’intérêt artistique. Aksenov y a fait preuve de son talent poétique et également, en un certain sens, philosophique, en créant une pièce dont le sens idéologique est riche de sa complexité. Il n’est pas vraiment fidèle à Claudel, mais il essaie de traduire le caractère globalisant et cosmique de la dramaturgie claudélienne, tout en transposant sa trilogie en une grandiose tragédie héroïque et pathétique.

Elena GALTSOVA

 

 

 


1Aleksandr Fevralskij, Zapiski rovestnika veka, Moskva, Sovetskij pisatel’, 1976.
2Mentionnons les recherches les plus proches sur le même sujet : Anna Sabašnikova, « Pol’ Klodel’ – vozpoždenie misterii », in Teatr, 1989, no 1, p. 147-153 ; Inna Malikova, « Claudel en Russie (1900-1920) », in Bulletin de la Societé Paul Claudel, no 127, 1992, p. 4-9 ; Katia Bogopolskaia, « Claudel et le symbolisme russe : sous le signe de l’éternel féminin », in Actes du colloque de Brangues, septembre 1993, Besançon, Centre Jacques-Petit, 1994, p. 1-10 ; Keith Tribbl, « Early Russian criticism of Claudel : Annenskii, Voloshin, Eikhenbaum », in Claudel Studies, vol. XXIV, 1997, no 1 et 2 ; Elena Galtsova, « Les pièces de Paul Claudel en Russie dans les années 1910 et 1920 », in Cahiers d’histoire culturelle, Tours, no 10, 2001, p. 75-98, rééd. 2009 ; « Claudel en Russie », Bulletin de la Société Paul Claudel, no 174, 2004 ; Inna Nerkasova, Pol’ Klodel’ i ecropejskaia scena XX veka, Sankt-Peterburg, SPBGATI, 2009 ; Vadim Polonskij, « Modernistskaia misterial’naia drama : kommetarij k teme Pol’ Klodel’ v Rossii », in V. Polonskij, Meždu tradiciej i modernizmom, Moskva, IMLI RAN, 2011, p. 271-285 ; Elena Gal’cova, « Teart Pola Klodela v Rosssii (1910-1920-e godi) », in Postiženie Zapada. Inostrannaja kultura v soveckoj literature, iskusstve i teorii. 1917-1941. Issledovania i arhivnie materiali, Moskva, IMLI RAN, 2015, p. 363-436.
3Voir, sur Aksenov-poète, les travaux du chercheur vénitien Alessandro Farsetti, par exemple, « La place de la musique dans l’œuvre du poète-futuriste Aksenov », Russkaïa philologuïa, Tartu, 2014, no 25, p. 234-242.
4Ivan Aksenov, Iz tvorčeskogo nasledia, t. 1, 2, Moskva, RA, 2008 (éd. N. Adaskina) ; voir aussi la thèse d’A. Farsetti, « La poesia di Ivan Aksenov (1914-1921) nel contesti dell’avanguardia russa : un’interpretazione », soutenue à l’université de Venise en 2015, http://hdl.handle.net/10579/6526
5Pol’ Klodel’, Tiara veka in Postiženie Zapada. Inostrannaja kultura v soveckoj literature, iskusstve i teorii. 1917-1941. Issledovania i arhivnie materiali, Moskva, IMLI RAN, 2015, p. 437-520. Cette édition a été réalisée par O.N. Kouptsova, V.P. Netchaev et E.D. Galtsova.
6Meyerhold, à cette époque, a monté quatre pièces de Maeterlinck sur la scène russe : La Mort de Tintagiles en 1905 ; Sœur Béatrice en 1906, Le Miracle de Saint-Antoine en 1906 ; Pelléas et Mélisande en 1907.
7Il existe des témoignages selon lesquels Meyerhold aurait voulu monter L’Annonce faite à Marie en 1916, par exemple celui de Boris Alpers qui a travaillé sur sa traduction : Alpers en parle dans sa lettre à Meyerhold du 15 juillet 1916. Voir Boris Alpers, Iskania novoj sceni, Moskva, Iskusstvo, 1985, p. 376. Ceci est confirmé par l’historien du théâtre N.S. Todria, dans Boris Alpers, Teatralnie očerki, Moskva, Iskusstvo, t. 1, 1977, p. 5.
8Et aussi pour répondre au « mystère de l’amour » que Taïrov essaie de montrer dans son Annonce faite à Marie dans Kamernij.
9Paul Claudel, Théâtre, II, Paris, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade (éd. Jacques Madaule et Jacques Petit), 1996, p. 1404.
10Anatolij Lunačarskij, « Molodaja francuzskaja poezia », in Polnoe sobranie sočinenij, t. 5, Moskva, Iskusstvo, 1965, p. 305.
11Anatolij Lunačarskij, « Drama Klodilja », in Polnoe sobranie sočinenij, t. 5, op. cit., p. 345.
12Vsevolod Mejerhol’d, Perepiska, Moskva, Iskusstvo, 1976, p. 213.
13Ivan Aksenov, Iz tvorčeskogo nasledia, t. 1, Moskva, RA, 2008, p. 155. Voir aussi l’article d’Olga Kupcova, « Inostrannoe v GosTiMe v 1920-1930-e godi : teatralnie emisari (I.A. Aksenov, S.M. Tretiakov, V.J. Parnah) », in Postiženie Zapada, op. cit., p. 320-362.
14Ivan Aksenov, Iz tvorčeskogo nasledia, op. cit., p. 157. Citation en russe : « Тиара века » в первой части почти поставлена в голосе, вторая все еще не переписана.
15Pol’ Klodel’, Tiara veka, op. cit., p. 478-490. À partir de la réplique de Lumir « Je sais que vous pouvez tout ici » (Я знаю, что вы здесь все можете) – jusqu’à la réplique de Turelure « Tu ne sais pas ce que je sais » (Ты не знаешь того, что я знаю). Voir Paul Claudel, Théâtre, II, op. cit., p. 422-443 (Aksenov a procédé à des coupures).
16Ivan Aksenov, « V prostranstvo », in Zrelišča, 6-7 septembre 1922, p. 4.
17Vasilij Fedorov, « Tiara veka », in Zrelišča, 7-12 novembre 1922, p. 18.
18Arkadij Pozdnev, « Materjalnoe oformlenie spektaklija », in Zrelišča, 24-30 octobre 1922, p. 9.
19Brouillon de la description des soirées organisées par GEKTEMAS. In RGALI 963-1-1327. f. 41.
20Aleksandr Fevralskij, « Večer rabot masterskoj Mejerhol’da », in Zrelišča, 13-19 mars 1923, p. 15.
21RGALI, 963-1-1327. ff. 41-43.
22.  Vasilij Fedorov, « Tiara veka », in Zrelišča, 7-12 novembre 1922, p. 18.
23RGALI, 963-1-1327. ff. 41-43.
24Correspondant à l’épisode de la première partie de La Tiare p. 460-461, de l’édition de 2015. Paul Claudel, L’Otage, in Paul Claudel, Théâtre, II, op. cit., p. 269, en commençant par « Grand Dieu… »
25C’est d’autant plus curieux que Cherchenevitch traduit le texte de la pièce très loin de l’original.
26.  Le « siècle d’argent » russe est une appellation post-factum de l’époque de la fin du xixe-début du xxe siècle jusqu’à la révolution d’octobre et même, dans certains cas, des années 1920, caractérisée par une grande floraison de la poésie et des arts. Pourtant le siècle d’argent est « décadent » et « épigone » par rapport au « siècle d’or » de la poésie russe qui se situe dans la première moitié du xixe s. (Alexandre Pouchkine, Mihail Lermontov, Ivan Krilov, Fiodor Tiutchev, etc.) Le siècle d’argent a été coupé par la révolution russe. Actuellement on a tendance à classer sous la rubrique du siècle d’argent non seulement des mouvements proches du symbolisme, mais aussi les avant-gardes historiques russes d’avant la révolution.
27Marc Eihengolts, « Le travail sur la tradution de l’Hérodiade de Flaubert », Krasnaïa Nov, Moscou, 1935, N 7, p. 196-203. Cette traduction a été absolument nécessaire à l’époque, et même « obligatoire », même si les collègues d’Eihengolts y ont vu beaucoup de défauts (y compris par rapport à celle de Tourguéniev), comme par exemple, Nikolaï Sobolevski qui y consacre un article très pointu : « l’Hérodiade de Flaubert dans la traduction de Tourguéniev et l’Eihengolts », Literaturni kritik, 1934, N 11, p. 187-193. Voir aussi l’article de Nikolaï Slaviatinski, « Deux Hérodiades », Krasnaïa Nov, 1935, N 1, p. 197-207.
28Mihaïl Kleman, « I.S. Tourguéniev, traducteur de Flaubert », Flaubert G., Œuvres complètes en 10 vol., vol. 5. Moskva-Leningrad, GIHL, 1934, p. 145-147.
29Ivan Aksenov, Elizavetinci, I, Moskva, Centrifuga, 1916, p. 278-279.

 

 

Bibliographie

Claudel, Paul, Une voix sur Israël, et son écho par Fabrice Hadjadj, Éditions Les Provinciales, printemps 2017.

Claudel, Paul, Lettres à Ysé, Éditions Gallimard, automne 2017.

L’Oiseau noir no XIX, Cercle d’études claudéliennes au Japon, 2017.

Ode, Atsuhi, « Entre Kami et Dieu – Claudel et la divinité japonaise », p. 1-35.

Mourlevat, Thérèse, « Présence de Paul Claudel à Vézelay », p. 73-89.

Nakamura, Yumiko, « Claudel “mystique à l’état sauvage” », p. 90-122.

Nishino, Ayako, « De Jeanne d’Arc au bûcher au nouveau nô Jeanne d’Arc », p. 36-72.

Uma Outra Missão Francesa 1917-1918 : Paul Claudel e Darius Milhaud no Brasil, textes de Paul Claudel, Darius Milhaud, Henri et Hélène Hoppenot. Ouvrage coordonné par Manoel Corrêa do Lago, Victor Burton et Guillaume Pierre. Contributions de Brice Roquefeuil, Flavia Camargo Toni, Marie-France Mousli, Pedro Fragelli, Éditions Andrea Jakobson, 2017.

Wang, Yu, La Réception des anthologies de poésie chinoise classique par les poètes français (1735-2008), Classiques Garnier, coll. « Études de littérature des xxe et xxie siècles », no 64, 2016.

Wasserman, Michel, Claudel et L’Indochine, Paris, Éditions Honoré Champion, coll. « Poétiques et Esthétiques du xxe et xxie siècle », automne 2017.